Le Fond du Problème ... ?

Publié le par MDV

En relisant "Les Mots", je souriais de l'assurance un peu naïve de Sartre lorsqu'il affirme n'avoir jamais connu son Surmoi.

La chose me paraît impossible.

J'en suis même à me demander si les Anciens Egyptiens, qui croyaient que l'esprit comportait 9 facettes aussi différentes l'une que l'autre que possible, n'étaient pas plus proches de la vérité que Freud lui-même.

La "trinité" que celui-ci nous a léguée, le Moi tiraillé entre le Surmoi et le Ça, reste cependant une excellente base de réflexion. Le problème, c'est le Surmoi, toujours à vitupérer, à faire le vertueux, l'aimant, l'attentionné et l'austère, celui qui agit comme l'autruche face à la Haine, au dégoût et à la douleur du Ça.

Et le fond du problème, c'est cette altérité perpétuelle entre l'un et l'autre. Avec son "Etrange cas du Dr Jekyll", Stevenson a poussé le raisonnement jusqu'à ses limites et comme il vivait en un siècle éminemment victorien, il a moralisé son histoire à outrance. Son Mr Hyde est un monstre, point, à la ligne.C'est dommage - et la propension qu'a eue le cinéma hollywoodien à en rajouter là-dessus est condamnable même si l'on ne peut que frissonner de délices devant Fredric March et Spencer Tracy.

(Dans la version de Fleming, cette scène sublime et si bien observée où l'on voit Bergman tenter de détourner l'obsession de Hyde et lui proposer une tasse de thé que le monstre, anglais malgré tout jusqu'au bout des ongles, accepte avec la plus grande courtoisie et le plus grand naturel ... !)

Mais c'est la version de Frears, avec John Malkovitch et Julia Roberts, qui, selon moi, restitue le plus honnêtement les affres et la complexité du Ça : oui, le Ça est mauvais et vengeur mais c'est parce qu'il est inapaisé, parce que jamais, jamais, il n'a eu le droit à la parole sans qu'aussitôt, ce fameux Surmoi, tout bouffi de son importance et de sa rigidité directive, ne vienne le poignarder par derrière.

Pour perpétuer la co-habitation pendant toute la durée de la vie humaine, il ne reste donc plus que la solution de l'altérité. Mais dès lors qu'on tente d'analyser le phénomène (relaxation, psychothérapie, etc ...), on se soumet à une souffrance encore plus terrible.

En ce moment, je voudrais n'être plus que mon Surmoi ou mon Ça. Mais pas les deux, surtout pas les deux. D'autant que mon Ça, mon pauvre Ça, si énergique, si bouillonnant d'habitude, encaisse des coups bien cruels avec la mort programmée de ma mère ...

Si seulement je ne pouvais que la haïr ou l'aimer.

Les deux, c'est l'Enfer.
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article